Les Ewe: données historiques et culturelles







Quelques données historiques et culturelles sur les Ewe.

© textes et photographies Angelo Micheli


De l’histoire et de la culture des Ewe ( ou Éwé, Éwhé) nous ne retiendrons ici que quelques aspects non exhaustifs mais utiles à leur compréhension[i] : le cheminement historique qui les a conduits à leur actuelle situation en Afrique occidentale et des points culturels fondamentaux. D'après leurs traditions, Les Ewe tirent leurs origines des migrations qui, à partir d'Oyo et Ketu en pays yoruba, puis Tado, donnèrent naissance au peuple ewe, dont l'histoire ne commence réellement qu'avec la fondation de Notsé (actuellement au Togo) au XVe siècle (De Notsé, ils entamèrent leur grande migration vers le sud du Togo et vers le sud-est du Ghana, probablement à la fin du XVIe siècle, et se dispersèrent en plusieurs communautés politiquement indépendantes par crainte d’être soumis à un pouvoir central fort (les Anlo au sud-ouest, les Bè au Sud-Togo entre autres, auxquels il convient d'ajouter le groupement des Guin), (Gayibor 1985 : 28-33).      

Cette migration aboutit à l'implantation des Ewe sur un territoire limité, à l'ouest, par la Volta et à l'est, par le Mono. Ce qui les mit respectivement en contact avec les aires d'occupation akan et yoruba. Bien qu’à la fin du XIXe siècle les Ewe occidentaux furent rattachés à la colonie anglaise de Gold Coast (actuel Ghana), et les Ewe orientaux au Togoland (actuel Togo), et que le problème de leur division fut évoqué maintes fois, dont en 1947 devant les Nations unies, cette séparation n’a jamais exclu un fort sentiment d’appartenance à une culture éwé commune. Elle se définit aujourd’hui aussi bien par des liens familiaux de part et d’autre des frontières que par une histoire, des traditions, et une langue communes (même si des différences de langages sont notées entre divers groupes ewe) (Fiawoo 1984 : 224). 

Terres des Ewe et sites d'où proviennent les reproductions photographiques des kpetata,
 au Togo et au Ghana.

Les Ewe occupent actuellement en Afrique occidentale : le littoral du golfe de Guinée e l'embouchure de la Volta, à l'ouest, à celle du Mono, à l'est, et l'arrière-pays sur une profondeur d'environ 150 km.. On note également la présence de quelques Ewe au sud-ouest du Bénin. En 1990, la population ewe comprenait, près de 1 860 000 personnes au Ghana, et près de 1 550 000 au Togo[ii]. Ils sont cultivateurs, pêcheurs en mer et dans les lagunes, où l'extraction du sel est importante. Leurs activités sont aussi influencées par celles de leurs voisins : on distingue des influences orientales (Fon et Yoruba), et quelques produits (tissage, tambours, tabourets) ressemblent à ceux des Ashanti. On les retrouve également dans de nombreuses activités commerciales provenant des échanges et dans divers métiers dus aux appels de la vie contemporaine.   

Que l’on se situe en milieu citadin ou rural, au Ghana comme au Togo, divers aspects de la vie quotidienne des Ewe prouvent la persistance et l’importance des pratiques coutumières, des rites et des cérémonies privées ou publiques, sociales et religieuses. Ainsi en témoignent Tɔgbui Michel Agboly Dadzie-Adjalle à Lomé (Togo) et Tɔgbui Sewor The 4th à Agavedzi Somey (Ghana)[iii]. Ces chefs traditionnels appelés tɔgbui sont les gardiens des us et coutumes. Alors que fia soit, semble-t-il, le terme ewe pour dire le chef, c’est celui de tɔgbui qu’on entend le plus souvent pour qualifier 1'expérience et la sagesse qu'on prête aux anciens, aux chefs de familles âgés. Ils peuvent être à la tête d’une unité administrative de base (canton, village, quartier) devenant ainsi, prétendent-ils, des intermédiaires de premier plan comme représentants de l’État auprès de leur groupe ethnique, et de leurs administrés auprès de l’État[iv]. Certains chefs sont également chasseurs de sorciers, sorciers eux-mêmes, parfois prêtres ; ils sont vus comme des intermédiaires entre le monde quotidien et celui des ancêtres. Rien de très étonnant alors à ce qu’ils soient consultés pour une multitude de questions : foncières, agricoles, sociales, coutumières, religieuses, et que leur participation soit sollicitée lors des funérailles.

Les pratiques religieuses des tɔgbui, tout comme celles de leurs congénères togolais ou ghanéens, relèvent d’une pluralité de croyances. Dans les campagnes et les villes, dans chaque village, dans chaque quartier, les robes blanches des Initiées et le tintement des gongs, la présence de Legba dans une cour ou devant une maison et celle de temples abritant ses dieux rappellent avec insistance l’importance du vodu (ou vaudou). Et ce culte s’accompagne également d’une adhésion aux religions révélées. De la naissance à la mort, les
Ewe conçoivent la vie comme une communication, et une continuité, incessante entre le profane et le sacré, entre le visible et l’invisible, entre le quotidien et l’au-delà. Cette relation nécessite la médiation de spécialistes afin de se concilier les faveurs des vodun et des mânes des ancêtres lors des rites et des sacrifices. Ainsi pratiques coutumières et religieuses entrent dans la définition d’un sentiment d’appartenance à une culture commune dans laquelle les Ewe se reconnaissent. À ces pratiques vient s’ajouter un ensemble de cérémonies. Les Ewe, comme de nombreuses populations d’Afrique de l’Ouest, célèbrent certains évènements de la vie par des rites de passage, tel le rite des funérailles qui célèbrent la mort comme une partie intégrante du cycle vital.




[i] De plus amples informations sont consultables chez Rivière(1980), De Medeiros (1984), De Surgy (1988), Cornevin (1988).
[ii] Selon les chiffres donnés par l’Encyclopédie Universalis consultable à l’adresse Internet suivante : http://www.universalis.fr/encyclopedie/ewe-evhe/
[iii] Entretiens avec Tɔgbui Michel Agboly Dadzie-Adjalle à Lomé (Togo) et Tɔgbui Sewor The 4th à Agavedzi Somey en avril 2011.
[iv] Selon « La loi, relative à la chefferie traditionnelle et au statut des chefs traditionnels au Togo », promulguée en 2007 par l’état togolais, consultable sur le Site Internet :
http://www.uct-togo.org/index.php?option=com_content&task=view&id=131&Itemid=84